Join the Revolution / Rejoignez la Révolution

Avec Join the Revolution, Action Zoo Humain part en quête de la « vérité » derrière la révolution. Tout comme dans ses spectacles précédents, la compagnie se rapporte explicitement à la réalité sociale et sociétale, qui se mondialise toujours davantage. Le questionnement autour la double identité flamando-tunisienne des frères Ben Chikha soulevée dans des spectacles comme Le Lion des Flandres (2003) et Notre-Dame de Flandre (2005) offre de la latitude à une perspective plus large, sur l’histoire coloniale et sur les développements actuels dans le monde arabe.

Join the Revolution est la deuxième partie de la Trilogie de la Vérité. Le premier volet s’articulait autour de l’exposition universelle à Gand en 1913, qui a exhibé 128 Sénégalais et 60 Philippins dans des villages reconstitués. Exactement cent ans plus tard, les frères Ben Chikha mettent sur pied La commission de Vérité. Dans l’ancien Palais de justice de Gand, sous la houlette du Président, le professeur émérite Herman Balthazar, des membres de la commission, des témoins et des experts se sont penchés sur la question : ces attractions exotiques étaient-elles racistes et déshonorantes ou, au contraire, un moment d’échange interculturel.

Dans Join the Revolution, un événement historique constitue le point de départ d’un questionnement sur le présent, mais surtout d’une réflexion active sur l’avenir. Cinq ans après le geste de désespoir de Mohammed Bouazizi qui s’est immolé (en décembre 2010), déclenchant par cet acte la Révolution tunisienne, AZH pose la question : « Comment les artistes peuvent-ils soutenir la démocratie naissante en Tunisie ? » Mourade Zeguendi, Marijke Pinoy, Chokri et Zouzou Ben Chikha examinent comment la révolution tunisienne peut nous sortir de l’impasse ici, en Belgique et en Europe ? Que pouvons-nous apprendre de leur révolution ? Que peut-elle signifier pour nous ? Que pouvons-nous signifier pour elle ? L’initiative de financement participatif Artiesten Zonder Grenzen (Artistes sans Frontières) est l’occasion idéale pour réfléchir au sens de l’engagement en ces temps turbulents et au rôle que l’art peut y jouer. Join the Revolution interroge les rapports de pouvoir et l’exercice de l’art (engagé).

La Tunisie, par le biais de quatre de ses organisations civiles majeures, a beau s’être vu décerner le prix Nobel de la Paix, le monde abandonne à son sort cet îlot de démocratie en Afrique du Nord. Malgré cet hommage symbolique encourageant de la communauté internationale, les touristes, les investisseurs et même l’équipe de tournage de Star Wars délaissent la Tunisie. Ce pays où les Ben Chikha ont leurs racines est souvent perçu comme le trait d’union entre le monde arabe et occidental. En raison de son riche passé historique et culturel, la Tunisie a su chaque fois réinventer son identité au cours de l’Histoire. Cette faculté exaspère au plus haut degré les forces fondamentalistes, comme le prouvent les attentats au Musée du Bardo (mars 2015) et sur la plage de Sousse (juin 2015).

Le spectacle s’inspire de l’opéra déconcertant et intemporel d’Henry Purcell, Dido and Aeneas, qui se déroule à Carthage. Les créateurs du spectacle ont trouvé des échos inattendus avec le présent dans l’histoire d’amour tragique entre la reine de Carthage qui accueille le prince troyen, dont les descendants fonderont Rome, fuyant sa ville mise à feu et à sang. « Il y a un parallèle entre la révolution tunisienne et l’opéra Dido and Aeneas de Purcell ». À nos yeux, la similitude est tellement frappante qu’on pourrait croire que Purcell avait prédit le Printemps tunisien, comme un rêve prémonitoire qui se réalise tant de siècles plus tard. Tout y est : le feu, la passion, les mensonges et la tromperie, le suicide, l’espoir ! »